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De la programmation musicale comme Art de l’humain

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(Article paru en premier Radioexpertise)

Donc voilà-t-il pas qu’il y aurait un acteur de plus dans la multitude (voire la fouillitude!) de l’offre qui nous permet de diffuser notre musique ! Oui, car désormais, le quart d’heure de gloire cher au regretté Andy W est pulvérisé, balayé, oublié au profit des nano-secondes d’exposition glanées par tout un chacun par son blog (et l’auteur de ces lignes, pas gêné par la schizophrénie, en est un exemple éclatant), sa page Facebook, Linkedin, ses tweets, etc… Et chacun, de consommateur de musique de (tenter de) devenir prescripteur en proposant à la planète entière (qui retient son souffle, du moins l’espère-t-on) sa programmation, sa liste de lecture, appelez-ça comme vous voulez, ou plutôt : comme l’éditeur qui vous ajoute à sa base de données l’a décidé.

Désormais, en plus des Deezer, Spotify – souvent cités en exemple mais dont il semble bien difficile de quantifier réellement les utilisateurs réels et réguliers -, il y a cette marque qui ferme des magasins un peu partout en France mais qui crée un nouveau service sur le Net.

Évacuons tout de suite – ce n’est pas le propos ici – les suspicions de valorisation fictive de la marque au moment où son propriétaire cherche à s’en défaire par un catalogue virtuel et sensément plus rentable que la présence physique sur le territoire. Le mauvais esprit n’est pas ma tasse de thé, ça se vérifie ici régulièrement. Même si on ne peut s’empêcher de penser que, après avoir vidé le sigle de son sens, on vide la marque de son affect dans le grand public. Mais il suffit…

Avec cette nouvelle offre (plus celle de la marque « qui nous prend pour des poires », ceux qui ont tenté de passer d’une tablette Android à un Ipad me comprendront), on commence à avoir du mal à recenser les offres de musique en ligne et on se demande un peu si tous ces gens ne voudraient pas un peu vaguement sur les bords marcher sur nos plates-bandes, nous autres gens de radio qui avons de longue date fait profession de diffuser de la musique.

Or, je pense que cette concurrence acharnée sur le modèle musical ne peut que nous inciter à nous remettre en question encore une fois, et ça c’est une bonne nouvelle. Toujours.

Dès lors où chacun peut devenir son propre prescripteur musical, quelle place nous reste-t-il ? Quel que soit le talent de nos programmateurs (et nous en avons d’excellents… mais pas que), que vont-ils créer de nouveau pour contrebalancer cette concurrence sauvage qui ne connaît ni rotations ni quotas. (Au passage, si vous trouvez que les réseaux matraquent leurs nouveautés, vous devriez entendre ce qui se passe chez moi quand ma femme a découvert un nouvel album !) Et oui, plus besoin des finesses de Selector dès lors que je peux programmer toutes les 20 mn le dernier Justin Bieber ! Et le raisonnement est aussi exact dans les Golds voire tout simplement les vieilleries !

Quand certaines radios nationales d’outremer que je connais bien proposent aux auditeurs de faire leur programmation elle-même, on vérifie qu’Alain Barrière est toujours vivant et que Franck Michael est bien aussi populaire qu’on a refusé de le croire dans les dîners en ville. J’entends par là que tout auditeur est programmateur désormais, y compris à même de créer ses réelles contraintes de programmation, ses tubes, ses Golds et ses playlists depuis qu’un outil comme Radionomy a ouvert gratuitement cette possibilité au premier crétin venu (pardon, j’ai le droit : j’use et j’abuse de l’outil!).

 - Alors, c’est quoi l’idée ? On abandonne la zik à la radio et on fait tous de RMC ?

Bravo, bonne question, bien qu’un peu provocatrice, facétieux interlocuteur. Mais mauvais énoncé. Parce que RMC, pour reprendre l’exemple fallacieux que tu m’as sournoisement jeté à la face, ce n’est sûrement pas une radio-sans-musique mais bien plutôt une radio-avec-contenu. C’est-à-dire qu’on ne balance pas un disque quand on n’a plus rien à dire comme je l’entends encore trop souvent quand je fais mon numéro de globe-trotteur/coach/formateur all around ze world. Alors oui, RMC, puisque tu m’en parles, a démontré avec suffisamment de réussite que la radio, ça marche très bien sans musique.

Comment ? France Info avant ? C’est vrai, mais RMC a aussi viré le ronron !

Mais on a bien le droit de continuer à diffuser de la musique ! (ouf de soulagement de quelques programmateurs de mes amis qui s’apprêtaient à me virer de la liste de leurs zamis-fécebook) Encore faut-il avoir une bonne raison de le faire. Et la meilleure, j’en suis persuadé, est de revendiquer cette musique comme celle de nos auditeurs. Je m’explique.

Je ne prête aucun crédit à cette étude américaine qui a déterminé scientifiquement (nan, je blague !) quels sont les meilleurs slogans pour une radio. Et qui nous a sorti des trucs du genre (je traduis approximativement) : « la musique que tu ne t’arrêteras pas de chanter avec », « les meilleurs tubes » (sans déc’!), « la musique qui te donne la banane », etc… On note l’originalité, la modernité du truc, qui vaut largement les regrettés « 7 tops d’un bloc » voire l’audacieux « 40 m de musique sans pub » (le slogan le plus poétique jamais inventé, de toute évidence). 20 ans de retard, au bas mot…

Au passage, à mon sens, le meilleur slogan pour une radio, c’est comme une bonne chanson d’amour d’Aznavour : ça parle à tout le monde sans être restrictif, ça a l’air précis quand il parle de la fille qu’il aime sans jamais nous dire si elle est blanche, noire, grosse, lilliputienne, etc… Mais ça nous parle. Parce qu’on peut mettre derrière non ce que la radio est réellement mais ce qu’on fantasme qu’elle soit. « Ecoutez la différence« , ça c’est bien : ça ne dit rien de précis (au fond, la différence, c’est que c’était plus chiant, des fois, non?) mais on a le droit de supposer que ça veut dire que c’est ‘achment mieux ! C’est du marketing, quoi, pas un horaire de trains comme « 40 mn de zik sans pub », puis « vous êtes au cœur de 40 mn de zik sans pub ». Pouah.

Alors quoi ? Un prof de radio, ancienne gloire de toutes les antennes dans son pays, qui avait ouvert une école de radio dans une capitale africaine et avec qui j’ai eu le plaisir de travailler sur une trop courte durée avait placardé cette devise dans sa salle de cours : « Tout disque que tu diffuses est le disque préféré d’un de tes auditeurs ».

… (là, quand je fais cette citation en formation, je laisse toujours un silence pour que mes stagiaires puissent prendre le temps d’intégrer cette phrase et d’en imaginer les conséquences dans leur pratique quotidienne. Considérez cet aparté comme pendant dudit silence et méditez cette phrase un instant… Je vais la remettre en plus gros pour qu’il soit bien clair qu’on est là à un point crucial de la démonstration:)

 

Tout disque que tu diffuses est le disque préféré d’un de tes auditeurs…

 

De cette maxime que nous devrions faire nôtre à chaque moment et que je lui ai donc volé sans le moindre scrupule et avec le bénéfice que l’on constate, il y a mille enseignements à tirer, tant dans notre pratique d’animation, que dans la fabrication de notre grille des programmes et notre réflexion autour de la musique dans cette dernière.

Voilà qui donne toute son importance à des émissions comme Ma Liste Préférée, de mon camarade Eric Jean² sur RTL ou la Discothèque Personnelle de la radio domienne sus-mentionnée. Et si vous ajoutez à cela les qualités d’intimité, de chaleur et de proximité, que sait distiller Eric, sa manière de draguer le micro, tout d’abord, pour venir chatouiller délicatement les poils érectiles de nos conduits auditifs, on trouve une manière absolument parfaite (mais sûrement pas unique, heureusement) de mettre l’auditeur au centre de tout.

J’ajoute que rien ne nous oblige (tout dépendra de la station et de l’horaire de l’émission) à abandonner, comme certaines pythies radiophoniques semblent nous l’indiquer, le côté prescripteur de la radio (au profit de tel site internet, des torrents, des robots, etc…). Car il relève encore de notre métier d’être capable, si nous l’osons, de partir des choix souvent mainstream de nos auditeurs pour les emmener, par système de références multiples, vers des chemins de traverse, des surprises, des analogies, etc… A ce moment-là, le travailleur du programmateur reprend toute sa valeur, s’éloignant de ses simples capacités à ingurgiter le manuel de Sélector, et s’appuyant sur une vraie culture musicale, large, riche et mise à jour et c’est par une vraie collaboration entre les deux techniciens/artistes que sont le programmateur d’une part et l’animateur d’autre part que l’on continuera à avoir de bonnes raisons de diffuser de la musique à la radio.

Et que, comme jamais « video killed the radio star« , le net, les sites marchands et les programmations induites resteront de simples vues de l’esprit tant que nous réussirons à rester plus intelligents qu’un robot et plus sensibles qu’un algorithme.

 

 

 


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